Martin, né à Sabarie, en Panninie, fut élevé à Pavie, où sa famille s'était retiré. Quoique ses parents fussent païens, il embrassa de bonne heure la foi chrétienne, et à l'âge de dix ans il fut admis au nombre des catéchumènes : on désignait sous le nom ceux qu'on instruisait pour les disposer à recevoir le baptême. Fils d'un tribun militaire, Martin fut obligé, à peine âgé de quinze ans, de prendre le parti des armes ; mais cette profession devint pour lui l'apprentissage des vertus les plus héroïques. Il avait surtout un tendre amour pour les pauvres et leurs distribuait tout ce qu'il pouvait épargner sur sa solde. Un jour, pendant un hiver rigoureux, il aperçut à la porte de la ville d'Amiens un mendiant à peine couvert de haillons et transi de froid. Martin n'avait plus d'argent ; aussitôt il coupe la moitié de son manteau et la donne à ce pauvre pour le couvrir. La nuit suivante il vit en songe Jésus-Christ revêtu de cette moitié de manteau, et il entendit le Seigneur dire aux anges qui l'entouraient : "Martin, encore catéchumène, m'a revêtu de ce manteau." Cette vision le détermina à demander le baptême, et, peu après, ayant quitté le service, il se retira auprès de saint Hilaire, évêque de Poitiers, fut ordonné prêtre par ce saint évêque, et, voulant vivre dans la solitude, il fonda un monastère à Liguge, à deux lieues de Poitiers. Ce fut là que Dieu le favorisa du don des miracles. La renommée de Martin s'étendit bientôt dans la Gaule, et il fut jugé digne de l'épiscopat. Le peuple de Tours le demanda pour pasteur, en 370. Saint Martin honora cette haute dignité par ses vertus apostoliques. Humble, charitable, plein de zèle, il parcourut plusieurs fois la Touraine, et par tout ses discours, confirmés par des miracles éclatants, convertissaient les idolâtres, qui étaient encore très nombreux dans les campagnes. Le saint évêque, n'interrompait ses missions que pour d'autres œuvre de charité, et il entreprit plusieurs fois de longs voyages pour intercéder auprès des princes en faveur des malheureux. Au milieu de tous ces travaux, saint Martin, fuyant la gloire qui le cherchait, aimait à cacher sa vie dans la solitude ; il occupait une petite cabane adossée à son église, et c'est de cette humble demeure qu'il veillait à la discipline et qu'il donnait à son clergé les leçons et les exemples des plus saintes vertus. Voulant laisser après lui des disciples qu'il aurait formés, il jeta sur les bords de la Loire les fondements de la célèbre abbaye de Marmoutiers. Les religieux qu'il y établit habitaient des cellules creusées dans le roc, et s'appliquaient à la méditation, à la prière et à la transcription des livres. Saint Martin consacrait à ses chers disciples tous les moments que lui laissait l'administration de son diocèse : il leur faisait de fréquentes instructions, et, à l'exemple de Jésus-christ, son divin maître, il puisait souvent ses enseignements dans les objets de la création qui s'offraient à sa vue. Étant un jour avec ses disciples dans la campagne, et rencontrant sur son chemin une brebis nouvellement fondue : "Voyez, leur dit-il, celle-ci observe très bien le précepte de l'Évangile ; elle avait deux robes, elle en a donné une à qui n'en avait pas. Nous devons suivre son exemple." Cependant saint Martin était parvenu à une honorable vieillesse, et le moment approchait où Dieu devait l'appeler à lui. Ayant appris qu'un dissentiment s'était élevé entre les clercs de l'Eglise de Candes, il partit malgré son grand âge et les rigueurs de la saison. Sa présence eut bientôt rétabli la paix, et il revenait à Tours, lorsqu'il fut saisi d'une fièvre violente et forcé de s'arrêter. Les disciples qui l'accompagnaient, rassemblés autour de lui, pleuraient en recevant ses adieux. "O notre bon père, disaient-ils, ne nous abandonnez pas ; à qui laisserez-vous le soin de vos enfants ?" Saint Martin, touché de leur douleur, versa aussi des larmes, et fit cette prière : "Seigneur, si je suis encore nécessaire à votre peuple, je ne refuse pas le travail ; que votre volonté soit faite." Malgré le mal qui le consumait, il resta couché sur cilice couvert de cendres, et là, priant toute la nuit, les mains et les yeux élevés vers le ciel, il rendit son âme à Dieu. Son corps fut transporté à Tours, dans la basilique qui lui fut depuis dédiée et où un tombeau lui fut érigé, tombeaux glorieux et vénéré, s'il en fut jamais, qui fut longtemps l'asile des malheureux, et devant lequel se prosternent plus d'une fois les puissants princes de la terre. La vie de saint martin a été écrite par Sulpice Sévère, son contemporain et témoin oculaire des miracles opérés par le saint évêque |